vendredi 3 avril 2015

Marathon Boy

Attention, documentaire dérangeant.
En effet le film dont j'ai envie de parler aujourd'hui et qui retrace le destin exceptionnel, hors norme, tragique, d'un enfant né dans la misère d'un bidon-ville indien, m'avait laissé un goût plutôt amer après son visionnement sur Arte il y a 3 ans et sa rediffusion l'été dernier.
Gemma Atwal, la réalisatrice, a suivi pendant six ans, pour la B.B.C, la vie de ce petit garçon, Budhia Singh, doté (selon son entraîneur) d'un talent inné et "divin" pour la course à pied et l'endurance.


L'histoire commence en 2002, dans un quartier misérable de l'état d'Orissa situé à l'est de l'Inde. Budhia, dont le père a déserté le foyer, est vendu par sa mère à un marchand des rues pour 800 roupies. La vie de cet enfant est déjà marquée par la maltraitance lorsqu'un certain Biranchi Das, entraîneur et directeur d'un club de judo pour orphelins et déshérités, décide de racheter et de récupérer le garçon, alors âgé de trois ans.
Il devient le mentor de Budhia chez qui il pense déceler un don pour la course et les longues distances et qu'il veut préparer pour les Jeux Olympiques (2020 ?, 2024 ?). Ainsi, selon la légende, l'enfant court pas moins de 48 marathons entre 3 et 5 ans.

Au début du documentaire, il entame un nouveau défi (qui dépasse notre entendement) devant de nombreux journalistes et une foule en liesse postée le long de son parcours. Budhia rallie Puri à Bhubaneswar, située à 65 km.

Les images sont, bien entendu, extrêmement choquantes lorsque, après un effort de plus de 7h, le garçon arrive dans un état d'épuisement tel qu'il est pris de convulsions et qu'il passe tout près de la mort. Ce que son entourage ne semble pas complètement réaliser.

Dés lors, l'enfant est érigé par son entraîneur comme un véritable symbole politique d'une population misérable qui s'élève par le sport face à un gouvernement corrompu. Le conflit est définitivement amorcé lorsqu'un comité pour la protection de l'enfance, mandaté par les autorités de l'état d'Orissa, décide d'interdire la nouvelle lubie de Biranchi Das, à savoir une marche pour Budhia de 500 km entre Bhubaneswar et Calcutta.

La situation s'envenime et l'on comprend, au fur et à mesure du film, que l'entraîneur n'est pas qu'un simple tortionnaire avide de reconnaissance et d'argent, mais bien le porte-parole d'une catégorie de la population, pauvre et abandonnée par le gouvernement.


Au milieu de ces hostilités, Budhia semble perdu, au bord de l'épuisement. Il est l'objet d'enjeux qui le dépassent. D'un côté il est soumis à un entraînement extrême par Biranchi et de l'autre il est manipulé par les représentants d'un état corrompu, et même obligé de témoigner contre son gourou.

La guerre, principalement médiatique et judiciaire, que se livrent l'Etat d'Orissa et Biranchi Das, franchit une nouvelle étape et bascule dans le "fait divers" avec l'assassinat du mentor. Ce dernier avait d'ailleurs annoncé de façon prémonitoire, au cours d'une interview, sa probable exécution exigée par des dignitaires qui voyaient dans cet homme charismatique et populaire une véritable menace.

Nos repères d'occidentaux sont bousculés tout au long du film car les relations entre l'homme, l'enfant, la mère biologique et l'Etat  sont finalement assez complexes et , bien entendu, tout est dans la démesure (la foule, les distances infligées à Budhia, l'effervescence médiatique, la corruption, les émotions....) et comme il est dit en préambule du doc : "Seuls les extrêmes suscitent de l'intérêt en Inde". Il est très difficile, on imagine, d'exister en tant qu'individu au milieu d'un milliard et demi de concitoyens, surtout si l'on est très pauvre.

Après la mort de son entraîneur, qui avait fini par officiellement l'adopter, Budhia retrouve un calme et un apaisement tout à fait relatif car il est placé dans un internat sportif d'état et semble bien sûr toujours "habité" par son mentor et son rêve de Jeux Olympiques. On le retrouve quelques années plus tard d'ailleurs dans ce reportage.

Pour ceux que cela intéresse et qui sont tentés par cette immersion totale et outrancière dans une vie indienne extra-ordinaire, je peux vous faire parvenir (Dropbox par ex) le fichier du film. On peut s'arranger en message privé.

Mais attention à laisser quelques idées reçues de côté avant d'entamer le visionnement, le voyage n'est pas de tout repos.




dimanche 29 mars 2015

Le Bharathon de Raj Vadgama

"If people don't laugh about your goals. They are not big enough". On pourrait approximativement traduire la devise de Raj Vadgama par "Si les gens ne rient pas de tes objectifs, c'est que tu n'es pas assez ambitieux".

Dans l'univers de la démesure et du running je viens de dégoter un sérieux client, le dénommé Raj Vadgama, vivant lui-même dans un pays habitué aux excès.
Il est le premier homme à avoir réalisé le Bharathon. Non il ne s'agit pas de la tournée des bars, mais bien du tour de l'Inde (Bharat en sanscrit), soit 10 000 bornes en courant et en moins de 6 mois. Il a joyeusement avalé l'équivalent de deux marathons chaque jour, aidé par de nombreux supporters qui ont, tour à tour, partagé quelques kilomètres avec lui.


Le périple a débuté le 15 Août 2014 pour s'achever le 25 janvier dernier à Bombay. La volonté de Raj à travers cet exploit était de promouvoir la course à pied (principalement dans les villages indiens). Voici une petite vidéo du début de son voyage.



L'homme est un habitué des très longues distances car il avait déjà réalisé l'exploit en 2011 de rallier Delhi à Bombay (1500 km) en 30 jours.


J'avoue que depuis ma lecture de "La grande course de Flanagan" dont je parle ici je voue, comme qui dirait, une fascination à ce type de coureurs et d'aventures.

Et je me prends à rêver d'un jour où, moi aussi, je ferai le tour....de mon quartier (Le quartierthon).